Depuis une dizaine d’années, Israël a fait de la cyberguerre une composante majeure de sa stratégie militaire contre le Hamas qui contrôle la bande de Gaza. Le pays dispose de capacités offensives et défensives de pointe dans ce domaine.
Les principales réalisations israéliennes dans le domaine du cyber :
L’Unité 8200 : Cette unité d’élite rattachée à l’armée israélienne est considérée comme l’une des meilleures au monde en matière de renseignement électronique et de guerre informatique. De nombreuses startups israéliennes dans le cyber ont été créées par d’anciens membres de l’Unité 8200.
Les soldats de l’unité 8200, ont mis au point des algorithmes et des codes qui ont conduit à plusieurs nouveaux programmes appelés « Alchemist », « Gospel » et « Depth of Wisdom », qui ont été développés et utilisés pendant les combats.
L’armée israélienne a qualifié l’opération « Gardien des murs » en 2021 de première guerre d’intelligence artificielle, en effet « Pour la première fois, l’intelligence artificielle était un élément clé et un multiplicateur de puissance dans la lutte contre l’ennemi », a déclaré un officier supérieur du Corps de renseignement de Tsahal.
Il s’agit d’une campagne unique en son genre pour l’armée israélienne. Nous avons mis en œuvre de nouvelles méthodes opérationnelles et utilisé des développements technologiques qui ont constitué un multiplicateur de force pour l’ensemble de Tsahal.
Les Startups : Israël est le pays qui compte le plus de startups spécialisées dans la cybersécurité après les États-Unis. Près de 20% des financements mondiaux dans le cyber en 2017 ont bénéficié à des sociétés israéliennes.
La recherche de pointe : Israël abrite des centres de recherche de renommée mondiale comme le Blavatnik Interdisciplinary Cyber Research Center de l’Université Tel Aviv. Cette fondation organise depuis de nombreuses années la Cyber Week annuelle de Tel Aviv, l’une des plus grandes conférences internationales sur la cybersécurité au monde.
Les capacités offensives de l’état d’Israël
L’unité 8200 mène des opérations clandestines pour infiltrer les réseaux informatiques du Hamas et de ses brigades armées. En piratant smartphones, ordinateurs et moyens de communication, le renseignement israélien parvient à localiser des combattants, intercepter des plans d’attaque et même contrôler à distance certains équipements militaires du Hamas.
L’opération « Pilier de Défense » menée par Israël contre Gaza en 2012 a vu l’utilisation innovante de cyberarmes pour contrer les tirs de roquettes du Hamas. En infectant les smartphones de responsables palestiniens, le renseignement israélien a pu localiser des rampes de lancement et même prendre le contrôle à distance de certains équipements pour les rendre inopérants. Ces frappes informatiques auraient permis de réduire significativement le nombre de roquettes tirées chaque jour sur le territoire israélien.
En 2020, la mystérieuse explosion qui a ravagé l’usine d’enrichissement d’uranium iranienne de Natanz serait le fruit d’une opération clandestine israélienne selon le New York Times. Le virus informatique introduit dans les systèmes industriels du site aurait provoqué un dysfonctionnement entraînant la destruction de près de 80% des centrifugeuses iraniennes. Un coup d’arrêt porté au programme nucléaire de Téhéran.
Ces deux exemples démontrent comment Israël est parvenu à développer une expertise unique au monde dans l’art de l’offensive informatique, capable d’infliger des dégâts physiques substantiels à ses ennemis. La maîtrise des cyberarmes fournit désormais à l’État hébreu un instrument de politique étrangère redoutable face à l’Iran et aux organisations terroristes palestiniennes.
Ses capacités de défenses et ses enjeux stratégiques
Israël protège étroitement ses infrastructures critiques (énergie, eau, télécoms) contre des cyberattaques du Hamas ou de ses soutiens étrangers. Le pays possède également le Dôme de fer, un système de défense anti-missiles alimenté par des technologies de pointe.
Mais la cybermenace se fait plus pressante pour Israël, en effet ces derniers mois, Israël a connu une multiplication d’incidents cyber illustrant la vulnérabilité croissante du pays face à cette menace diffuse et polymorphe.
En aout 2023, l’hôpital Mayanei HaYeshua de Bnei Brak près de Tel-Aviv a été la cible d’une cyberattaque. Selon les informations transmises, les systèmes informatiques de l’établissement ont été désactivés, mais le matériel médical n’a apparemment subi aucun dommage.
Quelques semaines plus tard, c’est l’aéroport Ben Gourion, pierre angulaire du transport aérien israélien, qui était désorganisé par une cyberattaque d’envergure contre Israël visant les GPS des avions a contraint plusieurs vols devant atterrir à l’aéroport Ben Gourion de Tel-Aviv à emprunter des itinéraires alternatifs
Sur le front de la désinformation, les élections législatives de fin 2022 ont été le théâtre d’une intense diffusion de fausses nouvelles visant à contester les résultats du scrutin. Le Shin Bet y voit la main de puissances étrangères cherchant à fragiliser le processus démocratique.
Plus préoccupant encore, des hackers iraniens ont réussi à pénétrer les systèmes de deux entreprises israéliennes de cyberdéfense en 2022, dérobant des données sensibles.
En effet un groupe de hackers appelé Moses Staff a affirmé avoir mené avec succès une cyberattaque contre trois sociétés d’ingénierie israéliennes, moins de deux semaines après avoir divulgué des fichiers qu’il prétendait avoir obtenus lors d’une attaque contre le ministère de la Défense.
Ces incidents rappellent la nécessité d’une vigilance constante et d’investissements massifs pour déceler et contrer des menaces en constante mutation. La sécurité à l’ère numérique requiert plus que jamais une paranoïa salutaire.
Cette réussite technologique va souvent de pair avec une confiance déraisonnable dans le renseignement technologique. Cette tendance fait souvent oublier le poids de l’humain dans le renseignement et elle cristallise aussi une tendance à se réfugier derrière ce qu’on nomme depuis les massacres du 7 Octobre, “la conception”.
Cette dernière tient sur la supposée dissuasion de l’ennemi, qui s’il “ a le malheur d’attaquer” sera contré par notre technologie. Il va sans dire que cette tendance participe à une forme d’aveuglement concernant les projets ennemis. Elle participe à ce que le Deutéronome appelle la croyance en “la force et la puissance de ma main”, si décriée à la fois par les Sages d’Israël et de hauts responsables sécuritaires israéliens eux-mêmes.
Avec un souffle divin, une main d’œuvre qualifiée et un écosystème dynamique associant armée, startups et recherche académique, Israël s’est imposé comme l’une des principales cyber-puissances au niveau international. Le pays est déterminé à maintenir son avance technologique dans ce domaine névralgique pour sa sécurité.
Souhaitons-lui la lucidité que la modestie et la pudeur savent donner à celles et ceux qui connaissent leur limite et ne sous-estiment pas leurs adversaires.
Yonathan Alexander
SOURCES :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Unit%C3%A9_8200
https://www.calcalistech.com/ctechnews/article/sj6s11ol2j
https://www.cairn.info/revue-defense-nationale-2015-9-page-58.htm
https://www.reuters.com/world/irans-zarif-blames-israel-natanz-incident-vows-revenge-tv-2021-04-12/
https://www.jpost.com/arab-israeli-conflict/gaza-news/guardian-of-the-walls-the-first-ai-war-669371