fbpx
Rechercher
Les plus populaires

Les juifs d’origine éthiopienne et le Hip-Hop

1943… Rafles du Vieux Port de Marseille

Sarah Schenirer : ajuster sans trahir

Qui a numéroté la Torah ?

Victor Mirkin: un incroyable destin

Des Juifs sauvent des Juifs : les frères Bielski

Le Palmier Mathusalem : 2000 ans d’attente pour un fruit légendaire

Tou Bichevat : La délivrance, le germe de l’invisible

Tou Bichevat : l’homme est comme un arbre des champs

Les premiers Juifs de New-York

Partager

Sarah Schenirer : ajuster sans trahir

Dans les moments de bascule de l’Histoire, à ses carrefours les plus sensibles, on trouve des femmes et des hommes d’exception, capables de percevoir ce que d’autres ne voient pas, et d’agir en conséquence.
Sarah Schenirer

Dans les moments de bascule de l’Histoire, à ses carrefours les plus sensibles, on trouve des femmes et des hommes d’exception, capables de percevoir ce que d’autres ne voient pas, et d’agir en conséquence.
Sarah Schenirer, fondatrice du réseau “Beith Ya’akov”, fut l’une de ces figures. Visionnaire, consciente des défis d’un XXᵉ siècle naissant et prometteur en bouleversements, elle pensa urgent de frayer un chemin nouveau dans l’éducation féminine orthodoxe.

Pressentant que, sans une alternative juive aux études profanes du dehors, ses consœurs quitteraient bientôt les valeurs de la Torah, elle prit les choses en main et ouvrit une école pour adolescentes : on y  enseignait uniquement des matières bibliques, mais à un niveau d’étude rivalisant avec celui d’établissements académiques non juifs.
Elle avait compris que ce n’est ni dans une rigidité paralysante, désespérément accrochée aux modèles du passé, ni dans des réformes fantaisistes défigurant la Tradition, que se trouverait la voie royale pour transmettre un judaïsme authentique aux générations futures.

Et en effet, elle réussira à conserver intactes les valeurs ancestrales de la culture hébraïque, tout en restant à l’écoute des changements de son époque.

……………………………………………………………….

Dans la Pologne des années 1910, les jeunes filles juives issues de foyers religieux se trouvaient en effet à une dangereuse intersection : fréquentant les bancs des écoles publiques, nombre d’entre elles se voyaient attirées par les promesses de la modernité et d’une pensée dite « éclairée », et s’éloignaient du chemin de la Torah. L’enseignement formel traditionnel leur était fermé, contrairement aux garçons qui bénéficiaient de larges réseaux de Talmud Torah ou pouvaient fréquenter les Yechivoth.

Pour Sarah Schenirer, venue du monde ´hassidique polonais, un tournant décisif se produisit durant la Première Guerre Mondiale : réfugiée à Vienne, elle y découvrit le monde de la   néo-orthodoxie des pays germaniques, initiée par le Rav Chimchon Rephaël Hirsch de Francfort. Elle y fut notamment marquée par une conférence d’un disciple du Rav Hirsch sur l’héroïne biblique Judith.
Avec foi en son Créateur et dans le bien-fondé de sa mission, elle ouvrit alors à Cracovie, en 1917, une première classe pilote, offrant aux jeunes filles un cursus incluant toutes les bases d’une solide culture biblique (lois — halakha —, pensée et histoire juive, connaissance des textes bibliques et de leurs commentateurs). En s’entourant de personnalités rabbiniques de premier plan (Rav Orléan, Rav Deutschlander), Madame Schenirer prit le gouvernail d’une institution qui allait connaître une croissance exponentielle.
Une classe de 25 adolescentes réunies dans une petite salle se transforma, au fil des années, en un réseau ramifié de milliers d’écoles à travers le monde.

Beith Ya’akov

La start-up « Beith Ya’akov » était née.

 

Des bancs de l’école, aux travaux pratiques…

Prises dans la tourmente de la Shoah, les élèves du séminaire de Cracovie et de ses succursales réussirent à garder intactes leurs valeurs et à aider leurs frères et sœurs dans des actions héroïques. Les filles de Beith Ya’akov firent leurs preuves même à Auschwitz, où certaines, ayant été nommées à des postes clés, comme cheffes de l’infirmerie, ne cessèrent d’agir pour sauver les leurs (To Vanquish the Dragon, Pearl Benisch, éd. Feldheim). Tila Ridguer, surnommée l’Ange Blanc d’Auschwitz, et Tsila Orléan sauvèrent tout un groupe de femmes hongroises destinées à être gazées sur-le-champ.

Survivantes du camp de concentration de Bergen-Belsen en avril 1945

 

 

D’autres, dont Pearl Benish, entreprirent des actions folles à très haut risque, osant entrer dans le coffre-fort hermétique du siège de la Gestapo pour sauver une amie.
Les enseignements reçus au Beith Ya’akov leur servirent de boussole morale même dans les circonstances les plus dramatiques qui soient.

Pourtant, à sa naissance, l’initiative d’un séminaire pour filles suscita des critiques. Certains leaders religieux voyaient dans cette école une innovation dangereuse. À leurs yeux, ouvrir un système d’éducation structuré pour les filles, avec une femme à sa tête, était une entorse à l’ordre énoncé par le grand maître du XIXe siècle, le ‘Hatham Sofer, face aux initiatives extrémistes du mouvement réformé en Allemagne : « ‘Hadach assour min haTorah », à savoir « Toute nouveauté est interdite par la Torah ». Mais il se trouva, entre autres, une sommité incontestée pour l’appuyer complètement : le ´Hafets Haïm, auquel se joignaient les deux grandes autorités ‘hassidiques de Pologne, le Rabbi de Gour et le Rabbi de Belz. Il y avait là deux mondes qui a priori s’entrechoquaient, mais dont elle sut faire l’alliage le plus parfait.

Une transmission vivante

On peut comparer la démarche de Sarah Schenirer au travail de ces artistes-photographes qui recolorent avec une précision infinie des photos anciennes en noir et blanc. Ils redonnent ainsi vie au passé en y ajoutant des teintes, tout en restant complètement fidèles à leur vérité historique. Les couleurs ne trahissent pas l’authenticité de ces images ; bien au contraire, elles permettent à une nouvelle génération d’y trouver un intérêt accru.

Ghetto de Varsovie.

Sarah Schenirer faisait de même : elle ajoutait des couleurs à une transmission qui risquait de devenir fade et désincarnée, sans pour autant altérer l’essence même de la Torah. Son œuvre s’est révélée prophétique. Ce sont les « sorties » des diverses promotions du Beith Ya’akov qui reprirent le flambeau de l’éducation juive orthodoxe pour filles après la Shoah.
Chaque époque exige une approche unique. Avec sa vision perçante, Madame Schenirer aura montré que la transmission juive, loin d’être un simple acte de conservation, est un exercice suprêmement délicat d’ajustement à son temps et à la modernité, sans pour autant trahir les fondements immuables de la Torah.

Et ce travail délicat d’orfèvre spirituel ne peut réussir qu’à une condition : lorsque les intentions de l’artisan sont éminemment pures et qu’il œuvre uniquement pour la pérennité des valeurs d’Israël.

 

2 Responses

  1. Il est inexact que dans les batei yaakov de Sarah Schenirer on n’enseignait que du kodech. Le kodech avait évidemment la part du lion, mais il y avait aussi des matières profanes comme le polonais ou les mathématiques, en accord avec l’attitude de « Torah im derekh Erets » dont provenait sa conception.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Partager

A découvrir également sur Yedia

Whatsapp Yedia

Ne manquez plus aucun contenu sur Yedia en rejoignant notre groupe Whatsapp. Une diffusion quotidienne.

Newsletter Yedia

Vous souhaitez recevoir la newsletter mensuelle de Yedia avec l’ensemble des articles, podcasts, et vidéos du site. Inscrivez-vous ici sans plus attendre.

Facebook Yedia

Ne manquez plus aucun contenu sur Yedia en rejoignant notre communauté Instagram.

Youtube Yedia

Ne manquez plus aucun contenu sur Yedia en rejoignant notre groupe Whatsapp. Une diffusion quotidienne.

Spotify Yedia

Retrouvez tous nos podcasts sur Spotify.  Il suffit de vous abonner à notre chaîne pour les écouter directement.

Yedia est un média dédié au Judaïsme, à sa culture, son patrimoine, et à son identité. Grâce aux contributions de ses auteurs et producteurs de contenus, issus de tous horizons, il se veut le témoin de sa richesse, et de sa diversité.

Art et culture, langue et écriture, société, histoire, sciences, lifestyle, judaïsme, sont les thématiques qui traversent Yedia.
Articles, podcasts, vidéos, sont disponibles sur la plateforme et permettent à tous à tout moment de pouvoir accéder au contenu.
Enfin Yedia se veut ancré dans l’époque dont il est issu, voire même dans le futur. Une partie des contenus sont consultables dans un metaverse accessible depuis le site Yedia.
Dans un monde dans lequel le savoir se dilue plus rapidement que l’ignorance, nous pensons que la connaissance est faite pour être partagée…au plus grand nombre, à tous, sans distinction.

Partager sans distinguer, et distinguer la connaissance de la croyance, afin de la faire comprendre, simplement et au plus grand nombre.
Sans partage, il n’y a pas de lumière.


Et ce qui n’est pas éclairé, reste dans l’obscurité.

Newsletter

Abonnez vous à la Newsletter de Yedia

Il vous suffit de remplir le formulaire ci-dessous.

En savoir plus sur Yedia.org

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Poursuivre la lecture