Hypothèse 1 : Au cœur de la ville de Hamadan, en Iran
La ville de Hamadan est considérée comme l’une des plus anciennes villes du monde. C’est ici que se dresse le mausolée abritant, selon une grande partie des opinions, le sanctuaire funéraire de Mordékhaï et Esther.
De nombreux legs du passé reposent sur ce site, véhiculés de générations en générations par la communauté juive persane. Ainsi, la ville de Hamadan est souvent associée à la ville de Shoushan, justement là où l’histoire de Pourim s’est déroulée.
Une autre tradition indiquerait que Hamadan serait plutôt la ville vers laquelle Esther et Mordékhaï auraient fui après la mort d’Assuérus, craignant que les partisans de Haman n’attentent à leur vie.
Ils y auraient bénéficié de la protection de la communauté juive locale et y seraient décédés à un âge avancé.
Le mausolée est composé d’une simple structure en brique couronnée d’un dôme, comme ceux édifiés au cours du XVIe ou du XVIIe siècle, afin de recouvrir les tombes souterraines.
Au plafond du mausolée se trouve une petite niche dans laquelle des bijoux ont été trouvés au début du XXe siècle par un explorateur français qui les auraient rapportés avec lui pour les confier au musée du Louvre.
Les Juifs de Hamadan racontent que la couronne trouvée parmi ces joyaux appartenait à la reine Esther.
L’entrée du bâtiment aurait été construite basse intentionnellement, afin d’obliger les visiteurs à baisser la tête en entrant, engendrant ainsi l’attitude de respect requise.
À l’intérieur de la salle principale, parementée d’inscriptions hébraïques, sont situées deux grandes pierres tombales en bois sculpté, recouvertes de voiles.
La pierre tombale de droite est attribuée à Esther et il y est inscrit « Ceci est le cercueil dans lequel Esther la Juste a été enterrée » ; tandis que sur celle de gauche, attribuée à Mordékhaï, on retrouve un écriteau inventoriant l’arbre généalogique de ce dernier, ainsi que l’inscription « Ceci est le saint cercueil de Mordékhaï le Juste ».
« Hamadan », rapporte Yona Azian, originaire de la ville, « est bel et bien la capitale de Shoushan, et c’est là que Mordékhaï et Esther ont été enterrés, proche du puits où se trouve une fosse profonde menant jusqu’à Jérusalem.
Selon notre croyance, lorsque le Machiah viendra, c’est par ce tunnel que les exilés résidant à Hamadan remonteront jusqu’au Mont du Temple ! »
Le motif de base n’est pas tout à fait clair, mais en 1968, une vigoureuse correspondance s’est échangée entre les représentants juifs au parlement iranien et les responsables du régime du Shah, Mohammad Reza Pahlavi, alors dirigeant de l’Iran.
L’objectif de cet échange était une tentative d’achat du tombeau d’Esther et Mordékhaï à Hamadan. Le prétexte ? Les célébrations marquant le 2500e anniversaire de l’Édit de Cyrus qui devaient se dérouler en 1971.
Dans cette déclaration historique, Cyrus le Grand, fondateur du premier empire perse, permettait à tous les peuples vivant dans les territoires sous son contrôle de revenir au culte de leurs dieux et divinités respectifs.
Or, Mohammad Reza Pahlavi, dernier Shah d’Iran, se considérant comme l’héritier moderne de Cyrus le Grand, cherche à projeter cette image de lui-même auprès des Juifs de son pays.
Les archives contiennent cependant des preuves que l’achat du terrain de la tombe a bien été réalisé, l’approbation finale du contrat datant du 18 janvier 1970.
Cependant, la période de « lune de miel » entre les Juifs d’Iran et les autorités de l’État allait se terminer rapidement et cruellement avec la révolution islamique de 1979 et l’arrivée au pouvoir de l’ayatollah Ruhollah Khomeini.
Cet événement a également provoqué la fuite de Mohammad Reza Pahlavi vers les États-Unis.
Depuis lors, la tombe d’Esther et de Mordékhaï est au centre d’âpres disputes.
En 2011, des étudiants soutenant le régime se sont révoltés à l’extérieur de l’enceinte et ont appelé à son retrait de la liste des sites protégés du patrimoine iranien —en réaction à la fausse affirmation selon laquelle Israël cherchait à détruire la mosquée d’Al-Aqsa. Leurs efforts ont été quelque peu couronnés de succès, puisque le panneau indiquant le statut de lieu de pèlerinage à l’entrée du tombeau a été supprimé.
La conséquence en est que le site n’est plus gardé. Il fait à présent l’objet de nombreuses menaces de destruction, et certains ambitionnent même de le remplacer par un consulat palestinien.
Hypothèse 2 : Au beau milieu d’un bosquet de Galilée en Israël
Fait intéressant, il existe une tradition concurrente identifiant le lieu de sépulture traditionnel de Mordékhaï et d’Esther à la périphérie du village de Bar’am, près de la ville de Safed.
Dès 1215, le rabbin Menahem Ha’Hevroni écrivait qu’en visitant la Galilée, il était tombé sur le tombeau de la reine Esther « qui, de son vivant, avait chargé son fils Cyrus de l’y amener [pour l’y enterrer] ».
Actuellement, cette sépulture serait située dans les ruines d’un bâtiment trouvé dans le parc national de Bar’am. Ici, en revanche, une simple dalle de pierre est posée sur un amas de pierres, avec l’inscription « Lieu de sépulture de Mordékhaï et d’Esther ».
Après la libération de la région lors de la guerre d’indépendance d’Israël, un groupe de Juifs de Safed s’y sont d’ailleurs rendus pour y lire la Méguila et célébrer le Pourim de l’année 1949.
Notre énigme n’est pas tout à fait résolue, puisque nous avons ici deux traditions contradictoires quant à l’endroit où nos protagonistes sont à ce jour enterrés, l’un les plaçant en Iran et l’autre en Israël.
Et bien que nous ne puissions dire avec certitude laquelle des deux hypothèses est la plus authentique ou la plus correcte, nous pouvons en revanche affirmer que l’amour d’Israël et la bravoure de ces deux grands héros ne s’effaceront jamais de notre mémoire collective !
Le drapeau israélien qui a été brûlé lors de la manifestation, sur lequel était inscrit « Génocide de 77 000 Iraniens ». Les manifestants affirment qu’à Pourim, nous célébrons le meurtre des Iraniens.