Monique n’a que quatre ans quand la guerre se termine et elle retrouve sa mère après avoir été cachée à la campagne. Son père n’est pas revenu de déportation et la petite fille va devoir vivre avec les fantômes des disparus.
Dans un livre bouleversant, Meira Barer, déroule le fil de son existence et la construction d’une vie pour une rescapée qui retrouve son identité entre la France et Israël.
Sauvée de l’enfer du Vel d’Hiv alors qu’elle n’a pas un an, Monique raconte que ses pleurs incessants poussent un policier à faire sortir sa mère avec elle, les sauvant de la déportation mais son père ne les a pas accompagnées.
Ouvrant ce qu’elle appelle des « tiroirs aux souvenirs », Meira évoque son enfance, sa mère brisée par l’absence et son père de qui elle ne possède qu’une photo.
Enfant cachée, Meira décrit avec émotion et pudeur le parcours d’une vie brisée par la Shoah et ce qu’elle qualifie de « travail sur soi ».
Près de la moitié de son livre est consacrée à sa vie en Israël et aux difficultés de l’Alyah mais aussi à son implication dans le devoir de mémoire, notamment au sein d’Aloumim, l’association israélienne des enfants cachés en France pendant la Shoah.
Il faudra des années à Meira pour pouvoir raconter son histoire et publier ce livre, qui vient d’être traduit en hébreu.
La priorité pour l’auteure est dit-elle « transmettre les paroles de vie, dire ce qui m’a permis de me relever et aborder l’avenir ».
Parler, c’est affronter des souvenirs difficiles mais aussi redonner vie aux absents, ces fantômes qui l’ont accompagnés toute sa vie.
Meira le fait avec du talent mais surtout son livre est un témoignage saisissant d’une vie volée, celle d’une petite fille qui grandit sans père et sans les repères « normaux » d’une enfant.
Souvent incapables de parler, les enfants cachés ont mis des années avant de raconter leurs parcours et pouvoir dire qu’ils ont été aussi des victimes, même si ils ont été des rescapés.
Mais ces enfants cachés, y compris les plus jeunes, ont également été des héros, des survivants forcés de construire une vie sur des ruines et sans le soutien de leurs proches, soit disparus, soit trop brisés pour leur apporter l’aide nécessaire à la construction d’une vie.
Ce livre est un témoignage essentiel qui permet de comprendre les difficultés d’une enfant cachée mais aussi le courage d’une femme qui a retrouvé sa place dans les maillons des générations qui l’ont précédé.
Comme un tison sauvé du feu, Meira Barer, Editions Les 3 colonnes, 2019