« N’est-ce pas une solution de facilité de prendre ces grands drames, ces grandes mises en scène de l’histoire? », s’était interrogé l’auteur durant la gestation du roman, pour conclure : « Je suis convaincu de la nécessité de ne jamais cesser d’écrire des romans à propos de la Shoah. »
C’est en visitant le seul camp de concentration ouvert en France par le IIIème Reich, au Struthof, en Alsace, que Raphaël Jerusalmy a pris connaissance d’une macabre découverte, révélée grâce à la ténacité du journaliste allemand Hans-Joachim Lang[1]Hans-Joachim Lang, Die Namen der nummer, Hoffmann und Campe, 2004. Publié en français aux Presses universitaires de Strasbourg en 2018 : Des noms derrière des numéros. L’identification des 86 … Continue reading. Le 2 août 1943, 86 personnes en provenance d’Auschwitz furent livrées vivantes avec l’accord d’Himmler, au camp du Struthof, à la demande du Pr August Hirt, le médecin du camp, pour parfaire sa collection de squelettes à des fins de recherches.
Partant de là, l’écrivain entrelace les destinées de deux hommes, victimes de l’oppression nazie, lesquels parviennent à « s’absenter » des contingences atroces dans lesquelles ils sont piégés. Paul Bernstein, collectionneur d’art, proche des grandes figures artistiques du Paris d’alors, s’étourdit dans les mondanités et la drogue, jusqu’à sa déportation à Auschwitz. Pierre Delmain, un écrivain communiste, interné comme prisonnier politique au Struthof, y survit car on lui confie la tâche d’achever les déportés agonisants en les étranglant de ses mains.
Résistant à l’horreur de la situation, il offre au mourant, le plus souvent désireux de quitter ce monde, un dernier regard plein d’humanité. Les 86 hommes et femmes destinés à la collection du médecin du camp rendent leur dernier souffle entre ses mains. Parmi eux, Paul Bernstein. Pour tenir, Pierre Delmain « s’absente » dans le rêve d’un roman à venir qui se déroule loin dans le temps, en Terre sainte, grâce auquel il tient le coup.
Après la Libération, il se donne pour mission de se remémorer les visages et les noms des victimes et porte le lourd fardeau d’être leur stèle. « In Absentia » est un roman fort qui résonne en nous longtemps après sa lecture.
Références
↑1 | Hans-Joachim Lang, Die Namen der nummer, Hoffmann und Campe, 2004. Publié en français aux Presses universitaires de Strasbourg en 2018 : Des noms derrière des numéros. L’identification des 86 victimes d’un crime nazi. Une enquête. |
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