Les prophètes de la Torah ont souvent évoqué des visions apocalyptiques et des scénarios de guerre qui sont interprétés à travers le prisme du messianisme. Isaïe, l’un des prophètes majeurs, offre des perspectives intrigantes sur le sujet. Il peint une image idéalisée des temps messianiques, déclarant que « Il jugera parmi les nations et réprimandera de nombreux peuples. Ils forgeront leurs épées en socs de charrue, et leurs lances en serpes. Une nation ne lèvera plus l’épée contre une autre, et ils n’apprendront plus la guerre. » (Isaïe 2:4)
Cependant, Isaïe aborde également la guerre dans un contexte messianique plus complexe. Le prophète décrit le Messie comme un guerrier qui « sort comme un homme de guerre, il excite le tumulte comme un héros de guerre ; il crie, il élève la voix, il montre sa force contre ses ennemis. »(Isaïe 42:13). Ces passages soulignent la dualité du Messie en tant que pacificateur et conquérant, suggérant que la guerre peut jouer un rôle dans la réalisation des temps messianiques.
La Guerre selon les Écrits de Zacharie
Zacharie, un autre prophète, offre des visions particulièrement détaillées. Il décrit Jérusalem comme le théâtre d’un conflit apocalyptique avant l’avènement du Messie (Zacharie 14) « L’Éternel sera roi de toute la terre ; en ce jour-là, l’Éternel sera unique, et son nom sera unique. » Il prophétise au sujet de Jérusalem (12 ;2-4) : « Voici que je vais faire de Jérusalem une amphore donnant le vertige à tous les peuples d’alentour ; même pour ce qui est de Juda, il sera là quand Jérusalem sera serrée de près. En ce jour, je ferai de Jérusalem une pierre lourde à soulever pour toutes les nations ; tous ceux qui voudront la soulever s’écorcheront cruellement. Cependant tous les peuples de la terre se réuniront contre elle. En ce jour, dit l’Éternel, je frapperai tous les chevaux d’épouvante et leurs cavaliers de démence ; mais sur la maison de Juda j’aurai les yeux ouverts, tandis que je frapperai de cécité tous les chevaux des nations.
Ces descriptions détaillées de la guerre et de la paix dans les visions prophétiques soulèvent des questions profondes sur la nature de ces événements et sur la manière dont ils s’inscrivent dans le plan divin du messianisme.
Pendant Souccot, nous avons tous entendu deux ’’haftarot’’, ce texte issu du livres des Prophètes (Neviim), lu publiquement à la synagogue après la lecture de la parasha lors du chabbat. L’une d’Ézéchiel et l’autre de Zacharie, parlant de la guerre de Gog et Magog. Rav Simha Bounim Sofer (1842-1906, connu sous le nom de Shevet Sofer, le fils du Ketav Sofer et le petit-fils du Hatam Sofer) cite un Midrash ’’Talpiyot’’ affirmant que cette guerre débutera pendant Souccot et fera partie du processus conduisant à l’avènement du Messie. La Mishna dans Edouiyot (2:10), le traité Edouiyot aborde divers sujets liés aux témoignages et aux dépositions, enseigne que ce conflit durera douze mois et impliquera de nombreux pays. Le Sefas Emes (1847-1905, rabbi de Gour) prédit que, contrairement aux guerres précédentes, lors de Gog ou magog, nous triompherons complètement et éliminerons leur mal pour toujours. Cela peut résonner avec l’engagement actuel d’Israël à anéantir enfin le Hamas en raison de son barbarisme horrifiant contre des hommes, femmes et des enfants innocents, malgré la condamnation préalable de ce plan par les antisémites du monde.
Les Enseignements des Sages sur la Guerre et le Messie
Les Sages du Talmud ont également abordé le lien entre la guerre et le messianisme. Le Talmud, dans le traité Sanhédrin, explore les signes précurseurs de la venue du Messie. Il mentionne des épreuves difficiles, mais également des moments de grâce divine. Dans Sanhédrin 97a, il est dit : « Rabbi Yehouda dit : « La génération où viendra le fils de David (le Messie), le tribunal de justice sera corrompu, la Galil sera détruite,[…], les habitants de la frontière iront de ville en ville sans trouver de pitié, la sagesse des scribes se perdra, ceux qui craignent de fauter seront méprisés, le visage de la génération sera comme le visage d’un chien, et la vérité fera défaut. » Ce passage suggère que des temps de grande difficulté précéderont l’arrivée du Messie.
Les sages du Talmud soulignent également la nécessité de la repentance avant la venue du Messie. Dans le traité Shabbat 118b, il est écrit : Rabbi Yoḥanan a dit au nom de Rabbi Shimon ben Yohai : Si seulement le peuple juif observait deux Shabbat conformément à leurs lois, ils seraient immédiatement rachetés, comme il est dit : « Ainsi parle D.ieu aux eunuques qui observent mes Shabbatot » (Isaïe 56:4), et il est écrit ensuite : « Et je les amènerai sur ma montagne sainte et les ferai se réjouir dans ma maison de prière » (Isaïe 56:7).
La Guerre comme Moyen de Rédemption
L’association entre la guerre et le messianisme dans le judaïsme peut être compréhensible à la lumière de la conception juive de la rédemption. La rédemption implique la restauration et la réparation du monde. Le concept de « Tikkun Olam » (réparation du monde) est fondamental dans la vision juive de la rédemption. Cela signifie participer activement à la justice sociale, à l’éthique, et contribuer à rendre le monde meilleur. La guerre, dans cette perspective, peut être perçue comme un moyen par lequel D.ieu intervient pour rétablir l’ordre et la justice dans le monde. Les épreuves mentionnées dans les écrits des prophètes et les enseignements de nos sages pourraient être interprétées comme des étapes nécessaires pour atteindre cette rédemption.
La Guerre comme Symbole de Conflit Spirituel
Certaines interprétations suggèrent que la guerre mentionnée dans le contexte messianique peut également être comprise comme un symbole de conflit spirituel. Cette perspective symbolique souligne que la véritable bataille pourrait être spirituelle, la guerre physique étant métaphorique de la lutte contre les forces du mal et de l’ignorance.
En conclusion, le lien entre la guerre et le messianisme juif est complexe et ambivalent. Les prophètes décrivent à la fois une ère de paix et des scénarios apocalyptiques, tandis que les enseignements de nos sages mettent en lumière les signes précurseurs de la venue du Messie, souvent entourés de défis. La guerre est envisagée comme un moyen de rédemption, mais aussi comme un symbole de conflit spirituel.
La richesse de la tradition juive réside dans sa capacité à accueillir des interprétations diverses tout en maintenant l’intégrité de ses textes sacrés. La quête du messianisme juif se poursuit, portée par l’espoir d’un avenir où la paix et la justice régneront.