Un peu d’histoire…
Si l’année 1901 est souvent retenue comme l’année de création de l’école Lucien de Hirsch, ce n’est pas tout à fait exact. L’établissement existe en effet depuis 1864, mais doit régulièrement s’exiler, les locaux s’avérant toujours trop étroits pour contenir le flux continu d’élèves venus de Russie et d’autres régions où les communautés juives sont alors en péril.
Les locaux actuels avenue Secrétan sont achevés en 1901 grâce au philanthrope et banquier belge Lucien de Hirsch, fils du baron Maurice et Clara de Hirsch, qui nommèrent l’école du nom de leur fils décédé à l’âge de 30 ans seulement de la tuberculose. Elle fut créée dans un contexte de forte immigration juive en France, notamment des communautés ashkénazes d’Europe de l’Est. Maurice et Clara de Hirsch, soucieux de l’éducation et de l’intégration de ces populations, souhaitaient offrir un lieu où il ferait bon vivre son judaïsme et où il ferait bon vivre en France républicaine. Des générations d’élèves s’y succèdent jusqu’en 1944, où alors 110 des élèves de l’école et de l’internat sont tragiquement arrêtés puis déportés vers Auschwitz-Birkenau par le dernier convoi parti de Paris. Seule une poignée reviendra.
Fondée en 1948 par le grand-rabbin Jacob Kaplan, les rabbins Élie Munk et Henri Schilli et l’éducatrice Mme Suzanne Aron (Benoit-Lévy), l’école Yabné fut quant à elle créée dans le délicat contexte de l’après-guerre, à une époque où la communauté juive tentait de se reconstruire après les pertes terribles subies pendant la guerre. Les premiers locaux étaient si exigus qu’une « solution » pour le moins originale fut mise en place : une partie des élèves y étudiaient le matin, tandis qu’une autre partie y était présente l’après-midi !
C’est grâce au concours des communautés de stricte observance parisiennes que des locaux spacieux sont construits puis inaugurés le 2 mai 1965 rue Claude Bernard. Ils permettent d’accueillir plusieurs centaines d’élèves. En 1993, l’établissement emménage dans des locaux ultramodernes et spacieux à la Porte d’Italie. Quelques 1400 élèves de la maternelle à la terminale s’y côtoient désormais.
Des défis relevés
Sous la direction de Mme Picard, qui dirigera Lucien de Hirsch de 1965 à 1992, l’école connait un formidable essor et met au point des méthodes pédagogiques innovantes pour l’enseignement du judaïsme et de son histoire. L’école se classe aujourd’hui 200e sur 2 277 au niveau national selon Wikipédia, un score tout à fait honorable.
Le rabbin Élie Munk, fondateur de Yabné, souhaitait initialement offrir une éducation juive de qualité à une communauté meurtrie et encore sous le traumatisme des déportations. Le défi n’était pas mince d’intégrer à la fois un enseignement religieux solide et un programme académique conforme aux standards de l’éducation nationale française. L’objectif était de former des jeunes capables de vivre pleinement leur judaïsme tout en s’intégrant au socle de l’excellence française de demain, pari parfaitement relevé jusqu’à ce jour. Yabné peut en effet s’enorgueillir de compter parmi ses anciens élèves des personnalités de tout premier plan tels qu’Elie Picard (pédiatre, directeur du département pédiatrie du Centre Médical Shaare Zedek de Jérusalem), les philosophes Yves-Charles Zarka, Dan Arbib, Arianne Kalfa, les professeurs Alex Klein, Ely Merzbach, Jacques Picard, et bien d’autres encore.
Parmi les directeurs de l’école, on compte le célèbre Albert Crémieux, mais aussi – et surtout M. et Mme Picard, qui laisseront leur empreinte indélébile sur des générations entières de « yabnéens » et sur toute l’éducation juive contemporaine de France.
A travers des décennies d’éducation, Lucien de Hirsch et Yabné ont continué à prospérer, adaptant leurs approches éducatives pour répondre au mieux aux besoins de la communauté. Aujourd’hui encore, loin de paraitre désuètes, elles permettent encore et toujours mieux aux élèves de développer leur identité juive tout en visant l’excellence académique. Dans la constellation juive parisienne, les deux écoles continuent de briller, d’innover et d’alimenter l’espoir du judaïsme de demain.