Une communauté juive en quête de reconnaissance officielle
Une des traditions communes à tous les membres de la communauté juive de Chine réside dans les noms de famille usités jusqu’à ce jour par ses descendants. En effet, on raconte que la communauté juive, confrontée à la difficulté de faire prononcer ses noms de famille par l’empereur Song de la dynastie Ming, s’est vu attribuer sept patronymes chinois : Zhao, Zhang, Shi, Li, Jin, Lao et Ai.
Cependant, en dépit de leur histoire riche et de leur contribution à la société chinoise, les Juifs chinois font face à un défi de taille : celui de la reconnaissance officielle en tant que minorité nationale. Bien que la Chine reconnaisse officiellement 56 « nationalités » ou « minorités », les Juifs et leurs descendants sont curieusement exclus de cette liste.
Cette situation découle d’une décision prise en 1949, sous l’influence de Staline, visant à définir les minorités nationales reconnues par le gouvernement central chinois. Mais de nouveau en 1953, puis plus récemment en 1980, les divers gouvernements ont encore fait le choix de ne pas accorder le statut de minorité nationale aux descendants des Juifs, considérant qu’ils ne répondaient pas aux critères requis pour être officiellement reconnus en tant que tels.
Cette absence de reconnaissance impacte péniblement la vie quotidienne des Juifs chinois. Elle se traduit notamment par de nombreuses limitations en matière de pratique religieuse publique, encadrées par la loi en vigueur. Par exemple, jusqu’à récemment, les communautés juives qui souhaitaient construire un Mikvé de purification, devaient convaincre les autorités qu’il s’agissait d’un simple spa ou bain public, et non d’un lieu de culte religieux.
Ainsi, les Juifs chinois continuent de se battre pour obtenir la reconnaissance officielle en tant que minorité nationale. Leur quête vise à préserver leur héritage culturel, à jouir de leurs droits religieux et à être pleinement intégrés dans la mosaïque ethnique et culturelle chinoise.
Chine et monde juif, une étrange similitude
On retrouve une étonnante corrélation entre la nation chinoise et le peuple juif décrite dans le Traité Théologico-Politique de Baruch Spinoza. En effet, Spinoza y présume qu’il y a une forte probabilité que les deux civilisations les plus anciennes du monde se rétablissent et retrouvent leur indépendance, car toutes deux continuent obstinément à préserver leurs différences par rapport aux autres civilisations. Selon lui, il existerait une “loi historique commune” qui s’appliquerait aussi bien aux Juifs qu’aux Chinois. Dans ce traité, Baruch Spinoza compare deux signes extérieurs qui préservent l’unicité des deux nations : la circoncision chez les Juifs et le tressage des cheveux chez les Chinois.
Respect naturel et appréciation virtuelle
Il est fascinant de constater que malgré le fait que la majorité des Chinois ne pratique aucune religion, une attitude de respect envers les Juifs persiste au sein de la société. Même si cette appréciation est souvent virtuelle et repose sur une méconnaissance réelle ou personnelle, la Chine représente une oasis de tolérance dans un monde de plus en plus marqué par un antisémitisme croissant.
Cette ouverture d’esprit envers les Juifs, conjuguée à la croissance économique fulgurante et à l’ascension de la Chine en tant que première économie mondiale, a incité de nombreux Juifs d’Israël, des États-Unis, d’Angleterre et de France à venir étudier et travailler en Chine. Des étudiants, des professionnels, des entrepreneurs et leurs familles choisissent de s’installer dans le pays, contribuant ainsi à l’essor de la communauté juive en Chine.
Aujourd’hui, la Chine compte neuf communautés juives, notamment à Shanghai, Pékin, Guangzhou, Shenzhen, Baiwu et Shandong, avec des synagogues, des écoles et des services casher. Cette présence juive dynamique témoigne de la diversité culturelle de la Chine et de sa capacité à accueillir et à intégrer des communautés venant de divers horizons. Malgré le déclin croissant des communautés juives ancestrales de Chine, leur histoire fascinante mérite d’être étudiée et préservée, contribuant ainsi à une meilleure compréhension de la diversité et de la richesse de l’histoire juive à travers le monde.