Une étoile à six branches
C’est une figure géométrique composée de deux triangles équilatéraux superposés ou, plutôt, entrecroisés : l’un dirigé vers le haut, l’autre vers le bas. On la retrouve sur le site antique de Megiddo, qui date de l’époque du roi Achab, 7e roi d’Israël, quelques 850 ans avant notre ère, mais aussi sur le linteau de synagogues galiléennes du IIe siècle, comme celle de Kfar Nahum — Capharnaüm — ou encore sur une pierre tombale juive du IIIe siècle, à Tarente, dans les Pouilles italiennes.
L’étoile : bouclier de David ou sceau de Salomon ?
Littéralement, « Maguen David » se traduit par « bouclier de David », en référence poétique à D.ieu. L’expression est employée dès le XIe siècle dans un sidour — livre de prières : il renvoie à la protection divine du roi David et s’appuie sur le psaume 18 dans lequel D.ieu est comparé à un bouclier. On raconte en effet que le jeune berger David, caché dans une grotte, aurait été protégé des soldats le poursuivant par une toile en forme d’étoile à six branches, tissée par une araignée sympathique. David, reconnaissant, aurait, devenu roi, ajouté ce symbole sur les boucliers de ses hommes pour les protéger. De plus, « lorsque le Roi David allait en guerre, il portait un drapeau composé de deux triangles posés l’un sur l’autre : l’un, pointant vers le haut et l’autre vers le bas. Ce drapeau avait donc six branches, ce qui fait allusion au règne du Créateur puisqu’il est présent en tout lieu : 1. En haut. 2. En bas. 3. Au nord. 4. Au sud. 5. À l’est. 6. À l’ouest. »
Mais l’étoile à six branches est également apparentée au fameux « Sceau de Salomon », cité dans le Talmud. La kabbale confère à l’hexagramme un sens religieux : il est repris sur des amulettes et talismans — ségoulot — mais sans être expressément nommé. Dans le Zohar, le double triangle de l’Étoile de David symbolise le lien des deux dimensions présentes en D.ieu, la Torah et Israël : le niveau extérieur de l’âme se connecte à l’expression extérieure de D.ieu par l’intermédiaire de l’étude des éléments ésotériques de la Torah ; l’essence de l’âme se connecte avec l’essence de D.ieu à travers l’étude et l’application des enseignements de la Kabbale.
La Maguen David est utilisée dans les manuscrits hébreux, comme le Codex de Leningrad de 1008 et les livres de prières qui se répandent au Moyen Âge, notamment avec le développement de l’imprimerie. En Espagne, jusqu’au XIIIe siècle, l’étoile à six branches est désignée par les Juifs sous le nom de « sceau de Salomon » et conserve des vertus protectrices.
Ailleurs, jusqu’au XVe siècle, les deux appartenances — David ou Salomon — sont utilisées indifféremment, jusqu’à devenir, sous le nom de « Maguen David », le symbole de la communauté juive de Prague et, deux siècles plus tard, la marque de la séparation, à Vienne, entre le quartier juif et le reste de la ville.
À la fin du XIXe siècle, la Maguen David est utilisée à la fois par le jeune mouvement sioniste et par les antisémites, pour stigmatiser les juifs : Le journal de Theodor Herzl, Die Welt, porte, dans sa première édition en 1897, l’étoile de David comme emblème. Un an auparavant, Herzl a proposé dans Der Judenstaat de créer un drapeau blanc frappé de sept étoiles dorées. Le sioniste David Wolffsohn propose plutôt de « dérouler » un talit — châle de prière ancestral —avec, en son centre, le bouclier de David. De symbole mystique et religieux, l’étoile de David prend une dimension politique et nationale.
Le drapeau d’Israël, représentant une étoile de David bleue sur fond blanc entre deux bandes bleues horizontales, est adopté le 28 octobre 1948, cinq mois après la création de l’État. Depuis cette date, l’étoile de David possède la double signification de représenter à la fois l’État d’Israël et l’identité juive en général.
Les symboliques de l’étoile
Pour les docteurs de la Torah, l’étoile à six branches symbolise les six jours de la semaine, le septième jour, le shabbat, se trouvant au centre. Dans « L’étoile de la rédemption », Franz Rosenzweig attribue à chaque sommet une notion fondamentale : la création, la rédemption, la révélation, l’humanité, le monde et D.ieu. Pour d’autres, l’étoile représente le Messie, selon la prophétie de Balaam : « Un astre issu de Jacob devient chef, un sceptre se lève, issu d’Israël. » Ce texte, extrait du Livre des Nombres, annonce la venue d’une étoile messianique, issue de la maison de David, d’où son nom. Pendant la deuxième révolte juive contre les Romains, Rabbi Akiva croit voir le sauveur d’Israël, dans le chef des insurgés, Bar Kosiba, qui changera son nom en Bar Kohba, c’est-à-dire… le « fils de l’étoile ».
Selon des commentaires ésotériques, les six points aux extrémités et les six points d’intersection représenteraient la disposition, par Josué, des douze tribus d’Israël autour de Jérusalem. Le triangle du bas symboliserait l’aspiration de l’homme vers D.ieu et, l’autre, celle de D.ieu vers l’homme. À moins que l’origine de l’étoile de David ne soit associée à la Ménorah du Temple et représente, de façon stylisée, une fleur de lys ?
Paradoxalement, ce qui a donné à l’étoile de David sa force de symbole éternel est son utilisation par les Nazis, cousue sur les manteaux des Juifs pour les identifier comme tels.
Sous ce signe, ils ont été humiliés, assassinés, détruits, martyrisés.
Sous ce signe, ils se rassemblent aujourd’hui, fièrement, sous le drapeau de leur pays.