Dans la représentation populaire, la Ménorah coïncide avec le chandelier de Hanouka datant du second siècle avant notre ère, mais ce n’est qu’une légende. D’une part, le chandelier de Hanouka compte huit branches tandis que la Ménorah, elle, n’en compte que sept ; d’autre part, nous avons des traces de la Ménorah bien avant l’épisode des Maccabées de Hanouka.
La Ménorah remonte en effet à l’époque biblique. Dans le livre de l’Exode, D.ieu a commandé à Moïse de façonner la Ménorah afin qu’elle soit placée dans le Tabernacle pendant la période où les Hébreux étaient encore dans le désert[1]Exodes 25 :31. Le Midrach[2]Rachi Ibid. Tankhouma Béalotékha nous raconte que contrairement à tous les autres ustensiles du Tabernacle, Moïse buta sur la Ménorah, il ne parvenait pas à comprendre comment la réaliser, jusqu’à ce que D.ieu la lui montra en vision.
La Ménorah fut taillée dans un énorme morceau d’or pur afin qu’elle soit le fruit d’une seule unité. Même ses calices, ses bourgeons et les formes de fleurs qui l’ornaient étaient y étaient incrustés comme le stipule le texte. Trois branches sortaient de part et d’autre du tronc en or massif avec, à leurs extrémités, une fiole d’huile. Au sommet du tronc, il y avait également un flacon qui s’unissait à l’éclairage des six autres. Au total, sept bougies irradiaient à l’unisson dans le Tabernacle de Moïse, puis plus tard dans le Temple du roi Salomon.
La Torah interdit que la Ménorah soit allumée avec un autre combustible que l’huile d’olive et elle ordonne que les fioles six autres branches soient placées de manière à ce que tout soit orienté vers la fiole centrale. Un autre fait particulier au sujet de cet ustensile, n’importe qui, même un Israélite étranger à la tribu des pontifes qui étaient en charge du service du Temple, pouvait l’allumer.
Que signifient ses particularités qui n’existent pas dans les autres dispositifs du Temple ?
Le premier à chercher un sens à tout cela est le Talmud de Babylone qui pose la question de savoir pourquoi un chandelier est nécessaire dans la maison de D.ieu « A-t-il besoin d’éclairage ? interroge le Talmud d’un ton ironique[3]Traité Ménahot, p. 86 et par cette question nous invite à y réfléchir.
Rabénou Béhayé (1255-1340)[4]Maxime des pères, chapitre 3 et le Gaon de Vilna[5]Kol Hator (1720-1797) déclarent que la Ménorah est le symbole de la sagesse. La littérature talmudique compare souvent la lumière à la sagesse. Dans les textes de la mystique juive, nous trouvons également cette notion telle que le démontre Nahmanide, dans les tout premiers versets de la Bible concernant la création.
Cependant, ils soulignent que la sagesse en question n’est pas celle de la Torah. Il s’agit aussi des sept arts libres qu’un Sage de la Torah se doit de maîtriser en plus de son érudition talmudique. Les Trivium et les Quadrivium que l’académie grecque de philosophie exigeait de ses élèves, comme la grammaire, la rhétorique, la logique, l’arithmétique, la géométrie, la musique et l’astronomie.
Ainsi l’allumage de la Menorah à l’huile d’olive, qui selon le Talmud est un facteur d’intelligence[6]Traité Bérakhot, p. 57, Horayot, p.13 , peut être fait par un étranger car il ne s’agit pas ici de la sagesse de D.ieu, mais attention toutefois, toutes les mèches convergent vers celle du milieu, comme pour nous dire que pour nous, toutes les sagesses doivent conduire à la connaissance du divin. De fait, certains sujets du Talmud ne sont pas tout à fait compréhensibles sans une bonne base en mathématique, géométrie ou dans certains cas en astronomie, comme dans les traités de Roch Hachana (p. 25) et Pessahim (p.84).
Ainsi la Ménorah rime avec l’exploitation des connaissances séculaires dans le but de les mettre au service de la connaissance de D.ieu. À l’instar de tous ses géants de la tradition juive qui étaient à la foi médecins, philosophes, mathématiciens ou astronomes et en même temps rabbins.
Le symbole de l’État juif n’est donc pas si anodin, il transmet l’idée d’une ouverture au monde tout en ne négligeant pas ses traditions et le but de son existence…