Les oranges de Jaffa avant la Seconde Guerre mondiale
Les oranges de Jaffa, également connues sous le nom d’oranges shamouti, ont été développées à partir de l’orange douce (C. sinensis) qui a été introduite dans la région méditerranéenne depuis la Chine par l’explorateur portugais Vasco da Gama en 1498.
Dans la première moitié du XVIIIe siècle, les vergers de Jaffa étaient répartis autour de la petite ville et dans la plupart des villages voisins, à Wadi Hanin, Ramleet Lod. Ils étaient arrosés par des roues hydrauliques. Au cours du voyage en 1839 du philanthrope juif britannique Moshe Montefiore dans le pré-État d’Israël, il s’arrêta à Jaffa et décrivit sa visite avec émerveillement : « Les rues de Jaffa sont droites et pavées, de beaux figuiers, grenadiers et orangers poussent dans leurs vergers, l’eau est puisée dans un étang et de là, elle est versée dans des canaux en pierre encastrés’’. La culture d’oranges de Jaffa et autres agrumes a commencé à s’étendre à travers le pays en 1890 grâce au baron Edmond de Rothschild. Les agrumes sont alors devenus la base économique de la plupart des colonies du baron. En 1900, sur 10 000 dunams (2 500 acres) de vergers d’agrumes, 2 000 dunams appartenaient à des Juifs.
Au début du XXe siècle, l’orange de Jaffa est devenu l’un des agrumes les plus populaires au monde. Présenté dans des publicités et sur des emballages, le nom Les oranges de Jaffa était devenu une marque connue dans les pays occidentaux.
Expédiées dans des caisses en bois et transportées par bateau comme un délicieux cadeau d’Israël aux quatre coins du monde, les oranges de Jaffa étaient l’orange préférée des Européens et Américains en raison de ses qualités que l’on ne retrouve pas dans les autres catégories d’oranges. Le commerce de l’orange a prospéré pendant la période du mandat britannique. Jusqu’en 1938, les agrumes représentaient 84 % de toutes les exportations locales.
Début de l’enseignement agricole Israélien
Durant le XVIIIe siècle, Rav Yehuda de Raguse (dont le nom deviendra plus tard Margoza) était le grand rabbin des Juifs de Jaffa. Il a d’ailleurs une rue centrale qui porte son nom au cœur de Jaffa, bordée d’orangers. Ce dernier aurait fortement participé au développement du commerce des oranges de Jaffa. Les débuts remontent en 1855, lorsque Moshe Montefiore lui acheta une orangeraie près de Wadi Musrara, aujourd’hui le ruisseau Ayalon, dans l’actuel centre de Tel-Aviv. Le rabbin Yehuda Margoza a également participé aux prises de décision de l’établissement d’une commune agricole – le Pardesim, (mot d’origine perse qui veut dire “champs” en hébreu) et de l’ouverture de l’école d’agriculture Mikvé Israël fondée en 1870. L’école était destinée à être un établissement d’enseignement où les jeunes Juifs pouvaient apprendre l’agriculture et à construire des villages dans tout le pays et faire fleurir le désert. Pendant de nombreuses décennies (jusqu’à la création du Centre Volcani et de la Faculté d’agriculture de Rehovot), l’école a servi de centre de recherche pour le pays. Les professeurs ont écrit les premiers livres d’études agricoles et ont servi de conseillers sur le terrain. L’essentiel du savoir-faire agricole des 50 premières années a été collecté et publié par Mikvé Israël. Après avoir terminé leurs études, les milliers de diplômés ont quitté Mikvé Israël pour fonder des colonies agricoles de toutes sortes, villages et kibboutzim, moshavim, fermes et écoles d’agriculture ; ou ont occupé des postes de gestion agricole.
La culture de l’orange de Jaffa dans les kibboutz
C’est à partir de la Seconde Guerre mondiale que l’exportation des oranges de Jaffa a commencé à décliner. Le manque d’engrais et les prix élevés des huiles nécessaires au fonctionnement des moteurs des puits ont provoqué un fort ralentissement de la production et des terres cultivées en agrumes. La production des agrumes reprendra après la création de l’Etat d’Israël dans les coopératives des kibboutz. Un cinquième des résidents juifs de la Terre d’Israël travaillaient dans la culture des agrumes prônant l’orange comme un symbole de la révolution israélienne.
Le goutte-à-goutte – un système d’irrigation révolutionnaire
C’est avec le système d’irrigation appelé le goutte-à-goutte que la récolte d’oranges et autres agrumes a fortement augmenté. Ce système d’irrigation, développé par l’ingénieur israélien Simcha Blass, permet d’économiser de l’eau tout en améliorant la récolte des agriculteurs. Orangers et autres agrumes, ont pu être plantés dans des régions arides du territoire grâce à ce système. Grâce à cette révolution technologique, l’État d’Israël exporte environ 580 000 tonnes d’agrumes hors du pays, ce qui rapporte des centaines de millions de dollars à son budget. Les oranges de Jaffa sont considérées, sur les marchés occidentaux, comme les produits agricoles les plus représentatifs de la production agricole israélienne.
Aujourd’hui, on compte plus de 182 000 vergers à travers le pays, mais les vergers d’orangers de Jaffa n’existent plus. Ces derniers ont cédé leur place à un paysage urbanisé. Malgré tout, la renommée historique des oranges de Jaffa a résisté aux tumultes de l’Histoire et sur chaque orange exportée dans le monde, il y a toujours le petit autocollant écrit dessus « Jaffa », qui rappelle la culture et le parfum des orangeraies de Jaffa.
L’orange de Jaffa a-t-elle un futur ?
Le marché mondial a changé depuis l’ère des Shamouti. Le principal défi auquel est confronté Israël est la concurrence avec les exportateurs égyptiens et espagnols. Mais l’industrie israélienne ne se repose jamais sur ses acquis; aujourd’hui l’espoir du futur de l’orange de Jaffa est placé dans le développement de nouvelles variétés d’oranges. A bon entendeur.